Si petits...

N'avoir plus qu'un  coeur qui bat dans ce corps. Et être seule devant le champs de bataille qu'ils ont laissé en le quittant. 

Jour étrange où ils échappent à toute prévision. Une perfusion qui sera inutile, une arrivée plus rapide que prévue. Cette salle si différente de l'autre six ans auparavant: bleue, avec une grande fenêtre. Et pendant toute une matinée les yeux sur ce ciel, son bleu profond, et sur les arbres. Se  dire que c'est le début de quelque chose. Il y a ce rire aux bords des lèvres, l'absence de douleur, cette petite main qui vers dix heures du matin va créer un peu d'affolement. 

  il y a cet homme qui exerce un métier de femme et qui les mettra au monde, encadré par trois medecins. Et puis il y a la naissance, en double. Dix minutes entre les deux. 

 Même taille, presque même poids. Si pareils qu'un instant tout le monde va les croire vrais. Mais non, faux jumeaux. Chacun identique qu'à lui même. leurs yeux qui aujourd'hui encore sont clairs. Qui hésitent entre le gris, le bleu, le vert et le brun clair. Rien du noir de leur soeur. 

Plus tard il y a le champs de bataille: la graisse en trop, qu'il va falloir sortir de ce corps, sans sport, la peau devenue centenaire, et cet étrange vide en plein milieu, qui réclamera sans doute une opération, qui rachetera dans la douleur ces rires des premières heures....

Il ya l'échec total de cet allaitement, la fatigue monstrueuse, comme se noyer dans un  océan, et se laisser glisser un peu plus chaque jour. Mais leurs regards qui préservent. Ces rêves en devenir. 

Mes enfants rois. Une étoile et deux météores.

Nos nuits si claires qui nous attachent les uns aux autres...