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Tendre Arsenic...
12 mai 2012

Selon que vous soyez puissant ou misérable....

L'impossibilité à devenir vraiment adulte. Impossible de rentrer dans le moule. A beau s'écorcher, raboter les angles, ça ne marche pas...Trente quatre ans du matin, et ça ne le fait toujours pas. Jamais. 

C'est une histoire compliquée. Un mélange de toute puissance masculine, de complaisance, d'auto satisfaction, de complexe inavouée. Un truc à vomir. 

Soit une organisation pyramidale d'environ dix personnes. Un grand chef. Il vient de la base. Un scientifique, thésard, dans une discipline pas très bankable. Mais une tête dans sa matière. Entre dans l'administration jeune. Petit échelon. mais l'important c'est d'y rentrer. Intellectuellement assez brillant, sachant se vendre. A sans doute pas mal bossé pendant des années. Monte à l'échelle vite. Arrive en haut assez tôt. Groupe A. S'est marié. 3 enfants, quelques aventures. Disons beaucoup du temps de sa splendeur, quand il était en pente ascendante. Un jour a plaqué la première épouse. Une seconde: un autre enfant. Nouveau départ. A de beaux restes. mais ce ne sont que des restes. En trouve une troisième. Amoureux d'une bonne cinquantaine d'années. Il sait faire: offrir des fleurs aux épouses des décideurs, trousser un beau compliment, se faire admirer des secrétaires, des femmes qui comptent. Un charmeur. 

Il aime le luxe. Et la terre, la pluie. Il vient du centre de la France, de ces montagnes pas très hautes. Aujourd'hui il vit sur ce qu'il a été. Il sait qu'il ne montera pas plus haut. Essaie de gagner troujours plus: a du mal entre les pensions alimentaires, les études de ses enfants, le train de vie qu'il veut mener, les cadeaux à sa nouvelle compagne. Il tire le diable par la queue, en gagnant cinq ou six fois le smic.... Il est capricieux, aime jouer avec les limites de la loi. A sans cesse l'impression de faire beaucoup et les autres autour rien. Même si travailler c'est juste planifier ses vacances des semaines entières sur le net. Il demande aux autres bien plus qu'à lui même. Mais il est le chef. Des défauts. Des qualités aussi.  Il est pédagogue, sait faire passer sa passion pour sa science. très bon esprit de synthèse. Cultivé, mais avec la passion des autodidactes. 

 

Iznogoud est différent. Contrairement au Calife, il n'assume pas ses racines les deux pieds dans la terre. Il se veut. Petit homme. Il  prétend faire un mètre soixante treize. Doit les bons jours atteindre en fait le mètre soixante neuf. Chausse un petit 38. S'habille comme un certain milieu dont il a appris tous les codes: pantalon en velour ou en toile, chemise vichy, pull aux épaules. Toujours très  chic, couleurs toujours raccord. Pas une faute. Une quarantaine finissante. Mauvais élève. Même voie prise que le calife, mais quelques années plus tard. Une voie de garage pour étudiants attardés. Pas de débouchés. il se voit chercheur. N'a pas vraiment le niveau. Met presque dix ans à faire une thèse, qui recevra tous les honneurs. Mais on se gardera bien de lui donner  un poste dans la recherche. Mais à force de se tenir sur la pointe des pieds, et d'aller dans tous les endroits qui comptent, de passer ses soirées étudiantes dans les Rallyes et autres sauteries pour gens bien nés, il finit par faire un beau mariage. Un très beau. Du coup il mène la grande vie tout en gagnant assez peu. Une très grande vie. Et il a le temps de s'occuper de ses deux filles, de faire du sport, de profiter de l'existence. C'est une sorte d'enseignant, roi tout puissant dans sa classe. Jamais de bonnes notes. il est le chef et il entend le rester. Il en impose à  son entourage, ses collègues , faisant son autopromotion, racontant ses vacances hors de prix, les options de sa nouvelle voiture de luxe, sa thèse si brillante. Il n'appartient qu'au groupe B. Ca le chagrine. Il est limité intellectuellement. Un peu bête. Fait du savoir comme de la confiture: il l'étale. il écrase les autres avec. 

Alors quand le Calife cherche un adjoint pour son établissement qui prend de l'importance, il joue des pieds et des mains, il fait une campagne de tous les diables, il lèche toutes les chaussures de ceux qui comptent pour être nommé. Une fois directeur adjoint il a un temps d'euphorie. L' air est rare dans les hauteurs. Des courbettes devant le Calife, une épaule compatissante  pour écouter ses problèmes  sentimentaux. il devient l'homme à tout faire: omnipotent, omniscient. Il est. 

Et puis un jour il se dit que le Calife est encombrant et entreprend de le destituer. Pour cela il se sert des gens qu'ils ont en dessous. Que des femmes. Une basse cour, deux coqs. 

il commence par chuchoter dans les couloirs, par déformer les propos du calife, par faire des contre réunions où il explique pourquoi le Calife a tord. Il conteste tous les ordres, mais jamais en face; il fait courir des bruits, monte en épingle la moindre faiblesse du chef. il est là pour le personnel: toujours prêt à écouter les doléances; il sait, il comprend, il compatit. Le responsable est connu de tous. Ca ne durera pas. Qu'on s'en remette à son panache blanc et on verre ce qu'on verra. Il n'hésite pas à aller voir les décideurs, à expliquer les ratés de son supérieur et pourquoi lui, il est tellement mieux. il veut le poste. Il l'aura. En attendant il y perd sa femme, et son train de vie. Alors la place du Calife devient véritablement une obsession. Sous les attaques le Calife se réfugie dans son bureau, travaille de moins en moins, et ne sort que pour des accès de colère et des caprices. Lui est le maire du palais.... il règne. 

Sauf qu'en dessous d'eux, il ya de la chair vivante. et qui souffre. Iznogoud n'a pas de qualité de coeur. il a besoin des lumières braquées en permanence sur sa personne, d'être obéi à la minute. Le roi a des défauts, mais le premier ministre est un véritable tyran. 

Tel est le décor que je retrouve tous les matins pour y jouer mon rôle huit heures durant. C'est peu de temps; A force c'est énorme. Et il y a les dégats. Et la colère. 

Première victime: elle vit encore. mais il suffit d'un rien pour qu'elle trépasse. Elle est fragile. Embauchée il ya un an. Elle vient des bas quartiers. A seize ans elle voulait devenir danseuse. Elle a sacrifié sa jeunesse à ça. Dernière enfant d'une famille nombreuse, qui n'a jamais eu d'argent. Pas la misère. mais vraiment pas loin. pas de belle éducation, de belles phrases et de belles études. Dès qu'elle parle on le sait. Elle a eu un reve. Un chanteur qu'elle a adoré. Qu'elle a suivi en tournée pendant des années. Il est l'homme de sa vie et l'ignore  totalement. Elle l'a rencontré. mais c'est avec un des musiciens qu'elle a fini la nuit.. et les suivantes. Mais entre le chanteur et elle il y a un lien. C'est en pensant à lui qu'elle s'est accrochée  pedant les années d'horreur. Après le temps des tournées, elle a épousé un joueur de foot. Un de ces types qui sortent des centre de formation, persuadé de faire une carrière, qui s'y voit déjà. Et qui parce qu'ils font trop la fête ne deviennent rien. Et qui se venge. il a commencé à la rapper très vite. A la tromper aussi. Elle , et son fils. Il ne travaille pas. il vit à ses crochets, et frappe. Pour un oui, pour un non, pour une couleur de rouge à lèvre qui ne va pas, une jupe trop courte, un steack mal cuit, un pleur de l'enfant. Et il la trompe. Avec le monde entier. Elle est amoureuse. Et elle a peur. Elle lui ouvre toujours la porte. La danse c'est loin. Remplacée par les soirées aux urgences. des années d'enfer. Le deuxième enfant nait  douze ans plus tard. Six mois après , le père part; la laisse seule. Il revient juste pour lui  prendre de l'argent, et lui donner un coup detemps en temps. Ils mettront six ans à divorcer. Il la qitte quand elle perd son travail. Et là elle craque. dépression. La jolie danseuse devient une obèse. Puis c'est l'obésité morbide. le fils ainé deale, et commence à reproduire le comportement du père. Elle dégringole....

A la faveur d'une mission de réinsertion sociale elle vient faire un stage chez le Calife tout en entamant un régime. On lui promet un emploi de secrétaire, au smic, mais stable. Une chance. elle s'acroche. elle decroche le job. Son ainé trouve lui aussi du travail. Elle revit. 

Mais Iznogoud ne lui pardonne pas son milieu de naissance, son manque d'éducation. Elle n'a pas le sens de la hierachie, ou mal. Elle n'a pas les connaissances suffisantes pour admirer sa maitrise du jazz. elle ne connait pas tel chercheur auprès de qui il a brillé. Alors il la rabaisse; Elle est secrétaire? fort bien: elle doit être à sa disposition, et lui ranger son bureau. Elle est secrétaire? Elle doit petre là quand il est là, rien à faire de son plus jeune fils qui rentre dans une maison vide. Elle est secrétaire? Qu'elle lui recopie l'annaire. Non, pas de photocopie. il le veut en arial  gras surligné. Elle est secrétaire? Elle n'est rien. Tout est bon our l'humilier. Il lui crie dessus. Elle, elle panique. se retrouve aculée, en enfer. il entend une bride de phrase concernant la sphère privée, sa vie sentimentale: il va l'attaquer la dessus. Elle perd toute motivation. se rend au travail une boule au ventre en espérant que cela se termine vite..... 

 

Deuxième victime: Une syndicaliste. Elle est travailleuse, intelligente. Niveau B. Elle est consciencieuse. A le respect des autres. fait tout pour ne pas qu'on écrase les plus faibles. Donne un coup de main. Elle est discrete. Vie privée devinée. Dans 4 ans est à la retraite. a eu les médailles du travail, les félicitations de l'administration. est reconnue par tous: élus, chefs. C'est quelqu'un de droit. Qui ne rentre pas toujours dans les cases. Qui refuse les petits arrangements et d'Iznogoud et du Calife. Elle hait par dessus tout l'abus de pouvoir et l'injustice. Une sorte d'Antigone de cinquante ans, qui fait l'unanimité. Pour son malheur on va dire à Iznogoud en haut lieu qu'il a de la chance d'avoir quelqu'un comme elle sur qui s'appuyer. Du coup elle devient la femme à abattre. Il lui enlève ses responsabilités, son travail, qu'elle fait à la perfection. Elle entend à travers les murs qu'on parle d'elle en mal. Son mari a un cancer. ils s'en fichent. On l'empêche de prendre ses vacances quand elle veut. Elle est responsable des comptes de l'établissement: on sous entend que si il ya des problèmes c'est de sa faute, alors même que le nom du véritable responsable est connu de tous. C'est un travail de sape; méthodique. 

Cette semaine je l'ai trouvée au  bord des larmes. Je suis censée faire celle qui ne voit rien, ne sait rien. je vais partie des chefs. Et je ne peux pas. C'est en se servant de moi qu'ils veulent lui donner le dernier coup. et je refuse. je ne sais pas combien de temps je tiendrai.  Accepter servirait, disent ils, ma carrière. Surement pas: je suis aussi une cible: plus haute qu'Iznogoud, plus diplomée que le Calife. je les inquiète. je ne rentre pas dans leurs cases. Pour le moment je glisse entre les mailles du filet preservant quand je peux ces deux femmes. Ca les agace, les deux chefs. L'adjoint me hait vraiment. Le calife m'aime bien..pour le moment. C'est lui qui m'a créé ce poste: un beau placard où je peux faire ce que je veux. une sorte d'electron libre sans  réel travail. Je m'ennuie. tendre arsenic cet ennui dans les veines. Ils me haissent? moi, je hais cette violence du plus fort, cet écrasement continuel et en douceur du plus fort. Nous avons été signalés à la medecine du travail à cause d'un mal être psychologique intense dans l'établissement.  Ce n'est pas flagrant. Les 35 heures sont appliquées. pas de burn out. Certes ça amuse les gens de pincer un peu la secrétaire, ou de lui faire des petites tapes en passant. Elle même n'a jamais su dire non, n'a jamais poser les limites , trouvait ça drole au départ. jusqu'à ce qu'il y est par moment une violence latente dans ces contacts physiques déplacés. Mais à peine. Il n'y a rien de consistant. et pourtant la menace est là. Dans l'air. On étouffe. Il ya déjà eu des dépressions graves,  des internements d'office. Mais pas à cet étage. Pas encore. Faudra t il un cadavre pour que les choses changent?  

Troisième expérience professionnelle, troisième fois que je retrouve cette violence douce, terrible, qui ronge les êtres, les bourreaux , comme les victimes. Je grandis, je me cache mieux. je refuse encore ce jeu, et ses règles malsaines. J'y arrive. Un peu de Baudelaire :âmes de ceux que j'ai chantés, âmes de ceux que j'ai aimés, aidez moi, soutenez moi. Et vous Seigneur mon Dieu accordez moi la grâce non de faire quelques beaux vers (il ya longtemps que là dessus je n'ai plus d'illusions ), mais de ne jamais devenir comme eux. Jamais bourreau. Mais peut être ai je déjà frappé? La nausée qui monte. 

 

 

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